L’équation du bonheur

Tout le monde veut changer le monde, mais personne ne songe à se changer soi-même - Léon Tolstoï

L’équation du bonheur

(Photo by moise_theodor on Pixabay)

Sur les réseaux sociaux ou dans la presse, quand le bonheur est évoqué, la mode est à la quête de sens, la raison d’être, le développement personnel, l’Ikigai (combinaison à la mode nippone de ce que vous savez faire, ce pour quoi vous êtes doué, ce qui peut vous rapportez de l’argent et ce dont le monde a besoin). C’est sans doute un progrès par rapport au culte de la réussite, de l’ambition et du matérialisme plus caractéristiques des périodes antérieures.

Et pourtant…

Des retours récurrents lors de mes sessions d’accompagnement pointent vers une schizophrénie individuelle et collective croissante :

  • Je veux m’éclater dans mon travail, avec une forte utilité sociale versus L’une des raisons principales d’un changement de job est la rémunération.
  • Le développement personnel est la nouvelle panacée versus Dans les premiers instants, je me présente comme occupant tel poste dans telle entreprise (option : avec tel diplôme).
  • Je veux me concentrer sur les choses qui ont du sens versus Je dois payer mes emprunts, mes charges, les études des enfants, mon prochain voyage au bout du monde.
  • Les entreprises égrènent les actions d’inclusion sociale, de féminisation, d’ouverture aux personnes en situation de handicap versus Des services ou des sites de production sont fermées sur des paramètres uniquement financiers.
  • La bienveillance et l’échange sont les nouveaux paradigmes versus Demandez aux commerçants, aux professions de santé et aux personnes en contact avec le public si les relations leur semblent plus apaisées qu’il y a une dizaine d’années…

Ces décalages nous ramènent à la question du bonheur. Le sens, l’utilité, les qualités humaines sont-ils des antidotes à nos problèmes ou des leurres ?

D’ailleurs, la réponse est-elle la même pour chacun ? Boris Vian disait-il autre chose : “Ce qui compte ce n’est pas le bonheur de tout le monde, c’est le bonheur de chacun” ?

Pour revenir à l’équation du bonheur, posez-vous cette question a priori assez éloignée du sujet : si vous courez en groupe avec l’obligation de rester ensemble, qui va définir votre rythme ? Ni le plus rapide, ni la moyenne des participants, mais le plus lent. Si Kilian Jornet se joint à votre groupe, cela ne changera pas (ou pas longtemps) votre rythme collectif.

Et s’il en était de même pour votre bonheur ?

  • Si vous êtes riche à millions, avec une vie personnelle et professionnelle foisonnante, mais que souffrez d’une maladie grave qui menace votre vie à court terme,
  • Si vous êtes en parfaite santé avec une bonne situation, mais dans une relation conflictuelle avec vos enfants ou votre conjoint,
  • Si tous les indicateurs sont au vert, mais que vos problèmes d’argent ne vous permettent pas de vivre décemment,
  • Si tout est plutôt positif, mais que vous ressentez un immense besoin d’utilité sociale, totalement absent de votre vie actuelle,

… Vous n’êtes sans doute pas pleinement heureux (sauf rares exceptions). Peut-être que ce qui définit le mieux votre niveau actuel de bonheur n’est ni l’élément au zénith de votre vie, ni même la moyenne pondérée des différents paramètres, mais le facteur limitant.

Imaginons que vous parveniez à identifier un ou deux éléments qui limitent votre bonheur. Si vous acceptez l’idée qu’ils sont les facteurs principaux, par restriction, de votre bonheur actuel, l’équation du bonheur ne devient-elle pas plus simple à résoudre ?