Satisfaire ses besoins pour améliorer son estime de soi : l’exemple du harcèlement moral

Tout le monde veut changer le monde, mais personne ne songe à se changer soi-même - Léon Tolstoï

Satisfaire ses besoins pour améliorer son estime de soi : l’exemple du harcèlement moral

(Auteur : Stéphanie Pirson, Stéphanie Pirson coaching)

(Photo by bstad on Pixabay)

La définition du Dictionnaire de la Psychiatrie des éditions du CILF décrit le besoin comme : « Un état qui résulte de tensions internes et qui concerne des satisfactions particulières (faim, soif, etc.). L’objet du besoin ne peut pas être substitué à un autre, mais il reste indifférencié pour un même besoin à satisfaire. Jacques Lacan distingue le besoin du désir et de la demande. »

Pour le dictionnaire de la langue française, un besoin se définit comme étant : « Une exigence née d’un sentiment de manque, de privation de quelque chose qui est nécessaire à l’existence ».

Autrement dit, un besoin est quelque chose d’essentiel à notre vie pour nous sentir bien, et il fonctionne en « mode binaire » : satisfaction ou frustration. Le besoin satisfait est une source d’énergie positive, constructive, d’émotions agréables. A contrario, un besoin non satisfait va souvent générer des émotions négatives, de l’angoisse, du stress.

Bien évidemment, à l’évocation des besoins, on pense à Maslow et à sa pyramide des besoins ou encore à Virginia Henderson et à son modèle des quatorze besoins fondamentaux.

Pyramide de Maslow

  • Besoin d’accomplissement de soi
  • Besoin d’estime (confiance et respect de soi, reconnaissance et appréciation des autres)
  • Besoin d’appartenance et d’amour (affection des autres)
  • Besoin de sécurité (environnement stable et prévisible, sans anxiété ni crise)
  • Besoins physiologiques (faim, soif, sexualité, respiration, sommeil, élimination)

Toutefois, ce modèle comporte plusieurs limites. Tout d’abord, il est exclusivement établi sur l’étude de la population occidentale. Puis, il semble que cette observation se soit essentiellement attachée à l’étude des collègues de Maslow, et en particulier à Ruth Benedict et Max Wertheimer auquel il vouait une profonde admiration. Il en fera d’ailleurs mention dans sa publication: « Il est vrai que la plupart des gens avec lesquels nous avons travaillé ont eu l’air d’avoir ces besoins de base dans l’ordre indiqué. »

En outre, chaque individu a une hiérarchie propre, et on peut aisément imaginer que des individus puissent avoir, par exemple, un besoin d’accomplissement plus important que le besoin d’appartenance à leur entreprise.

Selon le modèle de Virginia Henderson, les besoins fondamentaux de l’être humain peuvent être classés selon une liste ordonnée que les professionnels de santé utilisent lors des soins d’une personne malade ou en bonne santé. Son classement se distingue de la pyramide de Maslow, par une approche à la fois biologique et physiologique (les besoins primaires, le processus de régulation corporel), psychologique et sociale (les besoins secondaires), et même spirituelle (bien-être, besoin tertiaire et développement personnel).

Virginia Henderson liste donc 14 besoins fondamentaux : 1 respirer – 2 boire et manger – 3 éliminer – 4 se mouvoir et maintenir une bonne posture – 5 dormir, se reposer- 6 se vêtir ou se dévêtir – 7 maintenir sa température corporelle – 8 être propre, soigné et protéger ses téguments – 9 éviter les dangers – 10 communiquer – 11 agir selon ses croyances ou valeurs – 12 s’occuper en vue de se réaliser – 13 se recréer – 14 apprendre

Sur la base de ce modèle, tous les besoins sont à considérer avec la même attention. Chaque individu peut avoir, à un moment ou un autre, une lacune dans un ou plusieurs besoins.

Mais encore ? A quoi sert réellement la satisfaction de nos besoins ?

Être à l’écoute réelle de ses besoins c’est être attentif à soi-même, c’est s’estimer vraiment.

En coaching, le travail sur l’estime de soi passe obligatoirement par le travail sur ses besoins. Ils sont intimement liés à notre système de valeurs et, en les nourrissant, on apprend à mieux se connaître et à mieux se satisfaire.

Les victimes de harcèlement moral, plus que d’autres, doivent réapprendre à être à l’écoute de leurs besoins. En effet, trop malmenées, elles ont longtemps été coupées de certains d’entre eux, comme de dormir, de communiquer, d’agir selon leurs valeurs.

Les premières pistes sont là : « Quelles sont mes valeurs ? Et de quoi ai-je besoin pour les nourrir ? »

Dans la vraie vie, il est fréquent d’entendre : « J’ai absolument besoin de ce nouveau téléphone, ou sac à main ! » ou encore : « J’ai besoin de vacances, de soleil ! »

Parce que notre besoin réel est méconnu, il n’est pas exprimé : « J’ai un besoin d’appartenance, de reconnaissance ou de respect » (pour le premier cas) et « J’ai un besoin naturel de me reposer, de me réchauffer » (pour le second).

Reconnaître ses vrais besoins, en dehors des besoins primaires comme se nourrir et de s’hydrater (et encore…), est bien plus complexe qu’on ne le pense. Toutefois, apprendre à les connaître, à les identifier c’est faire un grand pas vers la connaissance de soi, de ses émotions, et donc de son fonctionnement. Et, accessoirement, cela peut aussi éviter de vider son compte en banque afin de satisfaire un besoin qui n’est pas le vrai, ce qui va donc générer de la frustration. Cela fonctionne aussi pour : les relations humaines, la nourriture, etc.

Travailler sur ses besoins pour les satisfaire pleinement, c’est donc nourrir son estime, s’apporter plus de sérénité, de belles émotions, plus d’énergie positive, un meilleur relationnel, et cette liste n’est pas exhaustive.

Les victimes de harcèlement moral se trouvent dans un état de stress aigu, totalement déstabilisées. Elles ont subi de nombreuses injonctions paradoxales qui leur ont, peu à peu, fait perdre la confiance en elles et l’estime de soi, le sens réel du travail, des valeurs.

Isolées, en proie à leurs doutes, et se sentant surtout dévaluées. Inexistantes dans le regard des autres, avec une impression de déranger, d’agacer. Habitées par un profond sentiment de culpabilité et de honte. Et il s’agit d’une hypothèse optimiste. En effet, je n’ai évoqué ni les victimes du Syndrome Post Traumatique, ni les tentatives de suicide.

Alors, bien évidemment, la solution miracle n’est pas là, dans la satisfaction des besoins. Toutefois, après ce marasme psychologique qu’est le harcèlement moral au travail (ou ailleurs), se reconnecter à ses valeurs et à ses besoins, c’est se permettre de continuer à avancer, reprendre possession de sa vie.

On définit le harcèlement par des diagnostics posés ou des causes liées tant au mode de management, qu’aux personnalités. On évoque des chiffres, des effets, les lois liées à ce phénomène. On fonde des hypothèses basées sur l’évolution de nos systèmes, la montée de l’individualisme et le narcissisme. On émet des théories sur le profil des victimes, leurs hypothétiques fragilités, tout comme sur celui du / des bourreaux, puisque le harcèlement moral revêt de nombreuses formes.

Derrière toutes ces descriptions, il existe un individu vidé de tous ses repères, et un des chemins vers la résilience passe par la reconnexion à ses besoins, car ils nourrissent ses propres valeurs. Les satisfaire vraiment, c’est se recentrer sur soi, renouer avec sa singularité, son identité profonde.

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